Je suis allée pour la première fois à la journée mondiale des sourds le 9 et 10 octobre. Le 9, j'ai été à la BFM à Limoges, et je regardais autour de moi des sourds qui signaient avec leur langue, je peux dire que je n'étais pas très à l'aise car je ne comprenais pas ce qu'ils disaient avec leurs mains. Il n'y avait pas des sourds oralistes comme moi, j'ai vu que quelques entendants c'est tout. Donc j'ai été à une conférence, il y avait Sophie Vouzelaud la 1ere dauphine Miss France 2007 et Cyril Jonard, judoka médaillé d'or aux jeux Paralympiques 2004. Ils ont parlé de la surdité, des problèmes, de l'association pour aider les sourds. C'était intéressant. A la fin du discours, ils applaudissaient avec les mains en l'air, j'avais oublié! Eh oui ça ne sert à rien de taper dans les mains puisque les sourds n'entendent pas. Ca m'a fait drole, car ça m'a rappelé des souvenirs de la LSF quand j'étais petite! J'ai parlé à Sylvie qui s'occupe de la compagnie ParOles atelier théâtre, elle m'a dit que ça commence en janvier! J'étais un peu embetée car c'est un peu tard alors je vais trouver une autre troupe de théâtre avant car vraiment ça commence à me manquer!
Le 10, je suis retournée à la BFM, à 14h il y avait une projection du film "Sourds et Malentendus" en présence des auteurs: Sandrine Herman et Igor Ochronowicz. Ce film parle d'un témoignage: "Etre sourd, ce n'est pas simplement ne pas entendre... Mais savons-nous vraiment qui sont les sourds? Sandrine, sourde de naissance, a choisi de raconter son histoire avec la volonté de nous faire partager sa vision du monde avec un regard de l'intérieur. En suivant son parcours et au fil des témoignages, nous découvrons un univers où tout conduit à vouloir réparer cette petite fille, à faire en sorte qu'elle se rapproche de la norme: entendre et parler. Et si une autre voie est possible?
J'ai beaucoup aimé ce film, c'était émouvant, j'ai failli pleurer car je ressentais un peu la meme chose qu'elle. Car ses parents étaient sous le choc d'apprendre qu'elle est sourde, et ils voulaient qu'elle suive une scolarité normale et qu'elle doit apprendre à parler. Mais cette fille n'a jamais voulu parler, c'était trop dur pour elle, c'est pour ça qu'elle a préféré de faire la LSF. Elle n'était pas à l'aise avec les entendants, elle se sentait trop différente, qu'elle venait d'un autre monde dont "le monde des sourds". Elle disait: ça sert à quoi d'entendre alors que je suis sourde? C'est un gros problème.
Je veux réagir à ce propos, moi c'est le contraire, quand je suis née, j'étais heureuse d'être dans le monde des entendants, j'étais fascinée par le langage humain, les bouches qui bougeaient sans cesse. Puis j'ai grandi, je pensais être une fille comme les autres mais je sentais une petite différence car j'avais un retard de langage et des difficultés de compréhension. Quand mes parents m'ont annoncé que je suis sourde, ça m'a choqué aussi, car je voulais pas être handicapée ni une fille qui vit dans le monde du silence. Je voulais devenir une "entendante". Pour communiquer avec mes parents, j'ai appris le langage de signes car je comprenais mieux le sens, ça a duré jusqu'a l'école primaire. Je lisais beaucoup sur les lèvres aussi. Les lèvres étaient mes préférés! Je détestais le silence, ça me rendait triste! Quand j'ai eu mes appareils auditifs j'étais heureuse de pouvoir entendre un peu le monde sonore. Puis j'ai eu l'implant, ça a été un grand changement dans ma vie, car c'est une puissance des sons, à partir de ce moment là, je suis enfin devenue "une entendante"! Je ne me sentais plus "sourde" et "handicapée". J'ai laissé tombé la Lsf très tot, je me suis mise à l'oralisation. Maintenant avec un peu de recul, je ne regrette pas mon choix. Mes parents respectaient mon choix, si j'avais choisi la LSF, mes parents m'auraient toujours soutenu. Mais en même temps je ne sais plus qui je suis... Car quand même je resterai sourde pour toute la vie, et pourtant je suis "entendante", c'est étrange vous ne trouvez pas? C'est compliqué tout ça. Ce serait plus simple si des sourds avaient une seule langue. Mais non, on a la LSF, l'oralisation, le LPC. Il y a toujours des tensions. C'est embetant. J'ai beaucoup entendu que les sourds signants sont contre l'implant car ça les oblige à parler et à entendre. Je sais que ces sourds ont peur de l'implant car ils ne savent pas ce qui l'attendent. Je souhaiterais à ces sourds d'entendre le minimum car c'est la seule chance. J'ai beaucoup de chance d'entendre. Les aveugles ne pouvaient pas avoir des miracles pour voir mais depuis quelques temps, les chercheurs ont inventé une technologie une sorte de "l'implant" pour voir. Les technologies évoluent! Je trouve ça dommage que les sourds veulent garder leur bulle de silence et de refuser d'entendre. Ca me révolte un peu mais bon je les respecte...
A 16h, j'ai regardé les entendants qui initient à la Langue des Signes Françaises, un sourd les apprend avec leurs mains les mots. Ils apprenaient à dire bonjour, de signer des animaux, de la maison, etc... Je n'ai pas oublié quelques signes, ça m'a rappelé des bons souvenirs d'enfance. J'ai remarqué que les sourds signants ne ferment jamais la bouche, ils ont toujours la bouche ouverte et "parlent" un peu mais sans voix haute. Je trouvais ça bizarre... Quand ils signent, ils montrent une certaine expressivité du visage et du corps, on voit des émotions!
A 17h, j'ai été voir une pièce de théâtre par la compagnie ParOles. C'est un atelier théâtre avec des sourds et entendants. C'était marrant, facile à comprendre grâce aux gestes, mimiques. Je me demandais si je suis obligée d'apprendre la LSF pour faire du théâtre. Car les entendants sont obligés de signer avec des sourds pour se comprendre. Ca ne me dérange pas de faire la LSF parce que je trouve ça théâtral. Mon rêve c'est de devenir une actrice professionnelle. Sophie Vouzelaud m'a parlé, je lisais sur ses lèvres, ça m'a fait plaisir. C'est une très belle femme, gentille, agréable en compagnie. Je l'admire!